NICOLAS DE STAÊL "LE PRINCE DESÉSPÉRÉ"
LE PRINCE DE LA PEINTURE
Nicolai Vladimirovitch Stael est un prince russe né à Saint Pétersbourg en 1914 dans une famille aristocrate contrainte de fuir la révolution bolchevik. Orphelin suite au décès de ses deux parents en exil, il est recueilli avec ses sœurs par un couple bruxellois.Puis émigré en Pologne en 1919. Il fait des études classiques à l'académie Royale des beaux arts de Bruxelles
En 1936 il voyage en Europe; l'Espagne ,l'Italie et le Maroc.
À Marrakech, en 1937, Nicolas de Staël rencontre Jeannine Guillou dans un café. Cette dernière est elle-même peintre, plus âgée de cinq ans que Nicolas. Bretonne d'origine, d'une famille de Concarneau, elle est mariée depuis six ans à un Polonais, Olek Teslar (1900-1952), qu'elle a rencontré aux Arts décoratifs de Nice et dont elle a un fils, Antek (Antoine) qui deviendra par la suite écrivain et scénariste sous le pseudonyme d'Antoine Tudal.
Les Teslar habitent le sud marocain dans une sorte de phalanstère où ils offrent des médicaments à la population. L'administration leur a fait signer des documents déchargeant la France de toute responsabilité en cas de malheur. Sorte de « hippies avant la lettre », les Teslar se séparent élégamment lorsque Jeannine part avec Nicolas.
Peintures du Maroc :
Nicolas et Jeannine arrivent en France en 1938 ou Nicolas étudie la peinture avec Fernand Léger pendant un court moment.
Puis il part à la légion étrangère .En 1940 il est démobilisé et réside à Nice ou il côtoie Alberto Magnelli ,Sonia et Robert Delaunay, Jean Arp, Le Corbusier; c'est ce qu'on appelle la première vague de l'abstraction et de la figuration Avec Picasso ,Braque, Matisse, Bonnard ..
Ses premières toiles sont des natures mortes et des portraits ,ses peintures sont plutôt dramatiques.
En 1943 il retourne à Paris sous l'occupation avec Jeannine ,Il a de terribles difficultés financières, sa situation familiale est désastreuse :
« Il n'y avait pas de repas. Un sac de farine nous donnait des crêpes à l'eau. La queue longuement tirée avec des tickets d'alimentation ramenait un peu de lait, un peu de beurre »
il rencontre Braque et fait une première exposition en 1944 avec Kandinsky et Magnelli ,ce qui lui vaut l'attention qu'il n'avait pas alors .
Nicolas de Staël et Georges Braque.
Chacun s'inspirait du travail de l’autre. Nicolas de Staël écrit à David Cooper, psychiatre : « Je vous serai toujours infiniment reconnaissant d'avoir su créer ce climat où la rhétorique de Braque reçoit la lumière d'autant mieux qu'il en refusa le grand éclat, où ses tableaux en un instant d'éclair font tout naturellement le chemin de Sophocle au ton confidentiel de Baudelaire, sans insister, et en gardant la grande voix. C'est unique », rapporte « Art Shortlist ».
Nicolas et Jeannine avec leur fille Anne et Antek Teslar le fils de Jeannine.
Jeannine
Jeannine est en mauvaise santé et elle le cache aussi bien à ses enfants, qu'à son mari dont elle <<soutient l'élan dans le travail>>. Nicolas voyait grandir ses tableaux sans soupçonner que l'état de Jeannine s'amenuisait.
Elle était moralement très forte et physiquement fragile. Jeannine rentre à l'hôpital Baudelocque afin de subir un avortement thérapeutique mal soigné et elle en meurt le
Jeannine
Baraban
Françoise Chapouton .
Quelques mois après la mort de Jeannine, Nicolas épouse Françoise Chapouton (1925-2012)que le couple avait engagée à l'âge de dix-neuf ans
pour s'occuper des deux enfants, Anne et Antek. Staël aura encore trois enfants de sa nouvelle femme, Laurence née le , Jérôme né en 1948 Gustave, né le
L'atelier Rue Gauguet.
En 1947, Nicolas s'installe dans un atelier 7 rue Gauguet à Paris, près du parc Montsouris, à deux pas de chez Braque.
En 1950 Patrick Waldberg poète ,critique et historien d'art de l'époque a écrit :
"L'atelier de Staël tient du puits ,de la chapelle et de la grange par ses proportions démesurées ,sa blancheur austère et son atmosphère d'activité intense mais recluse .Les visiteurs ,qui ,non prévenus y pénètrent se trouvent dès le seuil ,en perte d'équilibre ,leur habitude de voir se trouve déjouée ,quelque chose en eux se dénonce et les plus prompts aux commentaires se trouvent momentanément à cours de mots "
Composition abstraite
Les toits
En 1951 il rencontre le poète René Char avec qui il va collaborer et à qui il écrit :
"Tu m'as fait retrouver d'emblée la passion que j'avais enfant pour les grands ciels ,les feuilles en automne ,et toute la nostalgie d'un langage direct ,sans précédent ,que cela entraine "
Dès lors il retravaille plus sur le motif et la réalité figurative.
Avec Françoise
Jeanne Polge.
La période provençale de Nicolas de Staël commence à l’été 1953. Depuis deux ans, une amitié fraternelle le lie à René Char. C’est lui qui l’a poussé à découvrir son Vaucluse, à s’installer « auprès de la lumière, auprès du cassé-bleu ».
Le peintre débarque avec femme et enfants à « Lou Roucas », une ancienne magnanerie à la sortie de Lagnes. Char lui suggère de rendre visite à ses amis les Mathieu : ils vivent aux « Grands Camphoux », grand domaine agricole par où sont déjà passés le grand Ponge, le grand Eluard, le grand Camus.
Les Mathieu ont une fille, Jeanne Polge. « Quelle fille, la terre en tremble d’émoi, quelle cadence unique dans l’ordre souverain », écrit le peintre au poète. En août, il part en famille pour l’Italie. On passe par Gênes, par Naples, par la Sicile puis on remonte par la Toscane. Jeanne est du voyage.
Jeanne Polge.
Quand un mois plus tard ils sont de retour, Staël reste seul. À l’automne, il achète son « coin dans le Midi », le Castelet de Ménerbes où il travaille comme un damné (« il faut travailler beaucoup, écrivait-il en 1945 : une tonne de passion et cent grammes de patience »), se met « sur dix tableaux neufs tout d’un coup ».
Jeanne est son modèle et sa muse, elle devient sa maîtresse (peut-être pas dans cet ordre). En janvier 1954, il lui écrit comme on hurle : « Merci de regarder si longuement notre joie sur la mer. Merci de me déchirer mon amour. Je t’aime à hurler. Je t’aime à mourir. Je t’aime à voir la complexité la plus infernale, limpide dans ton amour. Je t’aime à aimer ton amour comme je t’aime. Je t’aime dans le risque, dans la paix d’un instant, de tout mon sang, de toutes mes larmes, de toute ma folie, de toi, de moi, je t’aime dans chaque poussière qui touche ton cœur. » Et en juin de la même année : « Tu me mets toi dans une espèce de délire, j’ai fait en une nuit de détresse, une après-midi et au retour de Marseille les plus beaux tableaux de ma vie. »
"Jeanne ou le réel" .L. Essai sur Nicolas de Staël Philippe Rassat. Pierre J. Truchot
<<En juillet 1953, Nicolas de Staël rencontre pour la première fois Jeanne Polge, sur les hauteurs de Lagnes dans le Vaucluse.
« “À cet instant-là”, lorsque Nicolas contemple la démarche de Jeanne qui échappe à tout pas cadencé, la matière s'endurcit, elle se cristallise dans ce corps unique qui l'éblouit et le séduit. “À cet instant-là” qui se prolonge, Jeanne change le monde, elle change les herbes, elle change les pierres. Elle déborde. Jeanne est là, comme si elle était présente depuis toujours, elle peut même se dissoudre dans le ciel. Elle est chair dans la chair. Le “j'ai toujours pensé peinture” qu'aimait à dire Staël se doublera dorénavant d'un “je pense toujours Jeanne”. Comment penser Jeanne et penser peinture en même temps ? Telle sera sa question à compter de ce jour. »
Jeanne, la présence de Jeanne, dans la peinture et la vie de Nicolas de Staël est le cœur de ce livre.>>
Nu de Jeanne.
Etude de Nu.
Nus de Jeanne.
Nu Bleu Couché
Françoise qui lui avait apporté une stabilité vit mal cette trahison et lui interdit de voir les enfants.
le Castelet de Ménerbes
Pendant que Staël est en Provence dans une solitude « atroce », sa renommée grandit, ses toiles sont exposées à New York. Le marchand Paul Rosenberg – Rosy, comme il l’appelle – lui propose de signer un contrat d’exclusivité.
Staël Achète un atelier sur les remparts d'Antibes.
Jeanne le distance et ne va pas à leur dernier rendez vous .
Le 15 mars Nicolas prend les lettres de Jeanne et va trouver son mari en lui tendant il lui dit : "vous avez gagné" puis il avale des barbituriques mais c'est le lendemain qu'il se jette de la terrasse de son immeuble à Antibes et c'est là qu'il rejoindra Van Gogh dans le suicide le 16 mars 1955 .
Un mois avant sa mort ,il peint 350 toiles. comme si le matériel le préoccupait Il laisse une lettre à son ami Jacques Dubourg :
« J'ai commandé chez un petit menuisier ébéniste près des remparts deux chaises longue en bois dont j'ai payé une, cela pour Ménerbes. Au soin de la douane il reste toujours, les papiers sont à la compagnie générale qui transporta mes tableaux la dernière fois, tous les papiers concernant ces petites chaises et tabourets que j'ai achetés en Espagne, aussi pour Ménerbes. Je n'ai pas la force de parachever mes tableaux. Merci pour tout ce que vous avez fait pour moi. De tout cœur. Nicolas >>
Portrait d'Anne de Staël
Bouteilles rouges
Trois poires
Nature Morte
Nature Morte
Coin d'atelier fond bleu.
Compositions Abstraites
Grande Composition Bleue
Le Christ
Composition abstraite.
Composition abstraite.
Composition abstraite
Les Bateaux
Bateaux
Marine bateaux
Bateaux
Les paysages
Sicile
Le pont des arts la nuit.
La route d'Uzes
Arbre Rouge
Les footballeurs
Les footballeurs
La musique
Le concert
Les Musiciens
Le Piano
L'orchestre.
La Plage
"Le contact avec la toile, je le perds à chaque instant et le retrouve et le perds. Il le faut bien parce que je crois à l'accident.Je ne peux avancer que d'accident en accident -dès que je sens une logique trop logique -cela m'énerve et je vais naturellement à l'illogisme.Il y a très peu de tableaux que je vois dans leurs dimensions exactes, que ce soit de souvenir ou face à face, et mes dimensions à moi, c'est franchement du hasard parce que je crois au hasard et non à la dimension exacte. Je crois au hasard exactement comme je vois au hasard, avec une obstination constante. C'est même cela qui fait que lorsque je vois, je vois comme personne d'autre".
Nicolas de Staël
<<Toute ma vie j'ai eu besoin de penser peinture, de voir des tableaux, de faire de la peinture pour m'aider à vivre ,me libérer de toutes les impressions ,de toutes les sensations ,de toutes les inquiétudes auxquelles je n'ai jamais trouvé d'autres issues que la peinture >> 1953
Nicolas de Staël
"Ma peinture, je sais ce qu'elle est sous ses apparences, . . ., c'est fragile comme l'amour."
Nicolas De Staël est un être torturé ,désespéré et angoissé car il a souffert de la guerre, de la famine, il s'est engagé dans la légion étrangère, il a perdu sa première femme. Mais avant tout Nicolas de Staël est un grand peintre, à ses débuts sa formation était académique et son penchant vers le figuratif mais finalement il se dira à la fois dans l'abstraction et le figuratif.
"Alors peu à peu ,je me suis senti gêné de peindre un objet ressemblant parce qu'à propos d'un objet ,d'un seul objet j'étais gêné par la multitudes des autres objets coexistants .
On ne peut absolument pas penser à quelque objet que ce soit on a tellement d'objet en même temps que la possibilité d'encaissement s'évanouit. J'ai cherché alors à atteindre à une expression libre "
Nicolas de Staël passe à l'abstraction en 1942.Travail d'architecte, avec des lignes et des traits épais construits au couteau comme un maçon devant son mur, et semblable à un mille feuilles . Il aura peint ,dit on ,des milliers de toiles durant une quinzaine d'année set occupera une place très importante dans la période de l'après guerre.
Mais de Staël refuse d’appartenir à un mouvement et se tient à l’écart des salons artistiques. « Je n'oppose pas la peinture abstraite à la peinture figurative. Une peinture devrait être à la fois abstraite et figurative. Abstraite en tant que mur, figurative en tant que représentation d'un espace », explique-t-il en 1952.
Il sera une célébrité malgré lui ,unique en son genre ;tout est dit dans votre phrase Prince Vladimirovitch :
"Je n'objecte rien à ce qui tombe sous les yeux je ne peins pas avant de voir, je ne cherche que la peinture visible pour tout le monde."
ANNE VR (-_-) xxx
Voir aussi Le musée d'art moderne: Nicolas de Staël, dans la rubrique Arts plastiques: "Expositions" de ce même blog.
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